Ma trail dans le bois



Ce que j’appelle une trail, c’est quand on se répète quelque chose dans notre tête, qu’on entretient une croyance.

On en a tous une. Une trail dans un bois sombre et dense qu’on va emprunter parfois au lieu d’aller sur l’autoroute du gros bon sens. Comme si on aimait ça, de temps en temps, se compliquer la vie, s’enfoncer dans notre zone de noirceur. On a beau travailler là-dessus, essayer de guérir nos bobos, suffit d’une journée où on tire de la patte, où on a le bobo un peu moins protégé, pour repartir dans notre trail, devenue bien entretenue et déboisée avec les années.

J’ai eu un léger relent récemment… Une belle promenade autant imprévue qu’indésirée.

Pour la petite histoire : on m’a invitée à participer à l’émission Accès Illimité (j’étais ben flattée que l’équipe pense à moi pour ce gros show !). L’émission porte d’ailleurs bien son nom, parce que c’est vrai que c’est un accès illimité à notre quotidien, à notre vraie vie. Parce qu’on tourne beaucoup : 2 jours et demi de tournage intense pour un reportage d’une vingtaine de minutes. C’est énorme en télé !

Dans mon cas, une portion était tournée avant les Fêtes dans ma famille sur la Côte-Nord (une première pour mes parents et moi d’avoir des caméras dans notre quotidien et dans la maison familiale !). Pour la 2e journée, on me suivait au travail, entre la radio et l’enregistrement de Ça finit bien la semaine. (Pour vous donner une idée de l’horaire de tournage, l’équipe, ce jour-là a débarqué chez moi à 6h45… pour me quitter à 23h ! Ouf !)

J’ai beau faire de la télé, connaître la patente, quand t’es filmée pendant une aussi longue période, un moment donné, t’oublies la caméra. Pour vrai. Les barrières, le vernis, tout ça tombe et on a accès au brut, au vrai. J’étais pleinement consciente de tout ça en acceptant de le faire. Parce que c’est là la force du show : on a accès à des perles de vérité, du « pas léché », ce qu’on ne montrerait pas nécessairement dans un autre contexte. Moi, c’est pas compliqué : on me pose une question et je réponds. Aussi simple que ça. Je suis incapable d’être stratégique et de filtrer, je réponds toujours le plus honnêtement possible, that’s it. Pas de game. Et j’assume. Complètement.

Jusqu’à ce que je vois la bande-annonce de l’émission…

Je m’y suis vue. Très peu maquillée, à la table familiale, en train de jaser en gesticulant, comme je le fais si souvent. Je m’y suis vue on ne peut plus vraie. Pis ça m’a foutu la chienne. Assez pour aller dans ma trail de « Oh My God, qu’est-ce que les gens vont penser ? »

Pourquoi ? Parce que toute ma vie, j’ai voulu cacher un peu de ma lumière, la dimmer même, par peur de déplaire, de déranger. Je me suis toujours sentie vulnérable en m’exposant. La façon la plus efficace que j’ai trouvée pour me protéger était d’en cacher un boutte. Ainsi, on ne pouvait m’atteindre vraiment. Seuls ceux qui m’aimaient pour vrai avaient aussi accès au laid, au noirci, au moins reluisant. Avec eux, je me donnais le droit de me lâcher lousse.

Donc, pour la première fois, dimanche prochain, y’aura pas de vernis. Pas de réflexe d’animatrice. Que moi. Avec mon gros rire gras qui vient du cœur, mes tapes s’a cuisse et ma vérité. Pis même si ça m’a fait peur au point de retourner dans la trail de mes anciennes blessures, j’y vais pareil.

Parce que je sais que maintenant, je m’aime assez pour m’assumer pleinement.

Le beau comme le laid.

Julie

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