Ça ne va jamais assez vite



Vous rappelez-vous de la chanson de Gerry Boulet qui disait : « Je suis celui qui frappe dedans la vie, à grands coups d’amour » ? Ben cette chanson-là, j’vous jure qu’elle aurait pu être écrite pour me décrire dans ma vingtaine. La petite blonde, qui avait l’air un peu gênée et pas sure d’elle, ben elle fonçait quand même, tête baissée, pour réaliser ses rêves. Et laissez-moi vous dire que ça y allait aux , pas de temps à perdre !

1996. J’ai 22 ans. Je viens de finir mes études en communications à Québec et je me lance sur le marché du travail. Avec des rêves plein la tête, mais très peu de compétences. Parce que dans mon métier, t’as beau avoir un diplôme, connaître la théorie sur le bout de tes doigts, ça ne veut pas dire que tu es capable d’animer. Loin de là. L’animation, y’a une partie que c’est « tu l’as ou tu ne l’as pas ». Et le reste, ben ça s’apprend sur le tas, à force d’en faire, à coup d’essais et d’erreurs.

J’étais un diamant brut mettons. Ben brut… même qu’à mes débuts, on peut dire que j’étais taillée dans le rough ! Rien de poli ni de lisse, juste de la volonté et une tête de cochon pour y arriver. Je savais en-dedans de moi que j’allais y arriver… je ne savais juste pas quand.

Moi à 28 ans, à CKAC. Mon premier emploi à Montréal.

Alors j’avais établi un plan (en bonne élève que j’avais toujours été, ça me prenait un plan de match) : mes années à Québec allaient être de la pratique, mon école où j’allais observer les meilleurs, apprendre, peaufiner mon travail. Tout ça en vue d’être prête pour les ligues majeures et déménager à Montréal. Je me disais à l’époque : « Quand j’arriverai à Montréal, je devrai être capable d’affronter les meilleurs de la province. Pourquoi on m’engagerait plutôt qu’une autre ? » Je devais apprendre.

Évidemment, ça n’allait jamais assez vite à mon goût. J’avais faim. J’étais insatiable.

J’animais à la radio les weekends, le matin de 6 à 9h (où je faisais ben des gaffes, j’ai jamais été bonne avec la console et les boutons !). Mais j’en voulais plus. Je rêvais déjà de faire une émission de semaine, dans une case plus prestigieuse. J’étais aussi engagée comme assistante de production à TQS Québec. Je combinais les 2 jobs, faisant du 7 sur 7 pendant une certaine période. J’en voulais plus. Je ne voulais pas être derrière les caméras, je voulais être devant. J’allais donc soumettre des idées de chroniques, de topos, des concepts d’émissions aux réalisateurs et aux patrons de la station. J’avais du cran (et de la naïveté !) tout le tour de la tête !

Mais j’étais souvent frustrée. J’étais insatisfaite de mon sort. Je connaissais mon but ultime et je savais que j’avais encore beaucoup de croûtes à manger, d’échelons à gravir… et j’étais encore très loin du but. Trop loin…

Heureusement, avec les années, j’ai calmé mes ardeurs. Je travaille encore fort (je dis souvent que je suis une bonne machine à travailler !), parce que j’aime ce que je fais, que je m’épanouie dans mon métier. Ça me nourrit, mais je ne défonce plus les portes comme avant. Pourquoi ? Parce que j’ai compris que ça ne sert à rien. Quand on essaie de brusquer les choses, de devancer les plans de la Vie, ça ne fait que nous épuiser. Et nous frustrer. C’est aussi bête que de s’accoter la tête sur un mur de briques et espérer qu’un jour, on réussira à passer au-travers à force de se péter la tête dedans. Ça n’a juste aucun sens !

Avec le temps, j’ai réalisé aussi que lorsque ça s’enligne tout croche, que c’est compliqué, qu’on a toujours des bâtons dans les roues, ben souvent, c’est tout simplement que ce n’est pas le bon chemin pour nous ou juste pas le bon moment. Donc au lieu de m’entêter, maintenant, je lâche. Je continue de faire des efforts bien sûr, mais si le résultat ne donne pas celui que j’espère, j’accepte et je suis le courant.

La résistance au courant de la vie, le refus de ce qu’elle nous donne, c’est de là que nait la souffrance. Ça, c’est une leçon qui m’a fait beaucoup de bien. Et qu’il fait bon se rappeler parfois. C’est ce que je vous souhaite aussi : apprendre à suivre le courant et accepter là où il vous entraîne. ?

Julie

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